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DELAIR, un des leaders mondiaux des drones professionnels était « Aux Rendez-vous Aéro de l’Innovation »
Convié à participer à la seconde table ronde de la journée, Bastien Mancini (X 2000 & Universidad Politécnica de Madrid 2004) Directeur Général et co-fondateur de DELAIR ici en photo, a répondu à nos questions et livre son point de vue sur l’insertion des drones du futur dans l’espace aérien et sociétal.
Votre société existe depuis 2011, compte 180 collaborateurs et possède des bureaux à l’international, comment est né votre concept de réaliser des drones de longue endurance ?
L’ISAE SUPAERO est, sans conteste, à l’origine de la création de notre société à Toulouse. Avec Michael De Lagarde, Benjamin Michel et Benjamin Benharrosh, eux aussi polytechniciens, nous cherchions à développer des drones de longue endurance à voilure fixe. Nous avons rencontré des professeurs et des étudiants de l’ISAE-SUPAERO qui menaient des recherches dans ce domaine. Ils nous ont encouragés à développer le concept et à créer notre société. Nous avons aussi cultivé avec eux, ce qui nous semble essentiel, un état d’esprit collaboratif. Depuis, notre collaboration n’a jamais cessé.
Nous mettons en place des échanges de matériels pour réaliser des tests et des essais, les laboratoires de l’ISAE-SUPAERO produisant eux aussi des résultats. Dans notre cas, c’est grâce à l’entente des personnes de l’ISAE-SUPAERO et de DELAIR et à leur volonté d’avancer ensemble que nous pouvons créer des produits performants.
Dans un marché du drone en plein essor et de plus en plus concurrentiel, qu’est ce qui fait votre spécificité et votre succès ?
Depuis le début, nous avons développé des drones à usage professionnel pour des applications spécifiques. DELAIR, c’est à la fois des aéronefs autonomes et des solutions de traitement de la donnée. L’inspection de pipeline a été notre premier secteur de développement parce que deux des fondateurs venaient de ce milieu. Fort de cette expérience nous nous sommes ouverts vers les marchés des mines, des constructions, de l’agriculture, de la surveillance et de la sécurité. Nous avons aussi continué à consolider le marché des inspections de réseaux d’énergies (pylônes électriques, pipelines, infrastructures...).
Pour tous ces marchés nous développons des solutions à la fois « hardwares », avec les drones que l’on conçoit et fabrique à Toulouse, et des solutions « softwares » en développant des applications de traitement de la donnée. Le drone n’est qu’un outil, un moyen pour le client d’acquérir des données. Il a ensuite besoin que l’on interprète et traite en finesse cette masse d’informations à l’aide d’algorithmes développés en interne.
On a deux unités organisationnelles propres, des business unit, avec des développements distincts. Nous développons des synergies avec ces deux unités et proposons au client une solution intégrée clé en main. Notre force est d’offrir une solution complète et d’assurer une prestation technique et d’interprétation de données sur un marché du drone très dispersé, où le client doit la plupart du temps monter lui-même son projet pour satisfaire son cahier des charges. Des solutions que nous exploitons à l’international dans nos bureaux aux Etats-Unis, à Singapour, en Chine, en Belgique tout en développant notre concept à Paris et à notre siège de Toulouse.
Il n’y a pas d’ingénieurs de l’ISAE-SUPAERO parmi les fondateurs de DELAIR. Pourtant, vous recrutez beaucoup à l’ISAE-SUPAERO. Quelles sont les qualités et les compétences qui vous intéressent ? Et savez-vous pourquoi ils viennent chez vous plutôt que dans un grand groupe?
Nous sommes effectivement quatre polytechniciens, mais avec une forte sensibilité aéronautique.
Nous concevons nos propres appareils, y compris la partie aérodynamique. Nous construisons notre propre auto-pilote avec des filtres de Kalman, des boucles de commande. Les étudiants de l’ISAE-SUPAERO ont des profils de pointe dans de nombreux domaines spécialisés. Ils sont tout de suite opérationnels à la sortie de l’école et connaissent l’ensemble des sujets que nous abordons en conception et en production.
Au début, on cherchait à recruter des ingénieurs prêts à mettre les mains dans le cambouis, un peu en opposition à Airbus. Chez nous, ils ont rapidement une vision complète du projet, ils peuvent suivre les différentes phases, de la conception au produit final commercialisé. Ce qu’ils codent un jour est testé deux jours après et ils peuvent voir le résultat en vol et l’analyser. Je pense que ceux qui travaillent chez nous ont cette disposition d’esprit et qu’il satisfaisant pour eux de faire partie d’une société qui fait tout elle-même.
Par le recrutement des élèves et la collaboration avec les laboratoires, vous êtes donc fortement impliqué dans l’ISAE-SUPAERO. Menez-vous d’autres contributions dans les formations et dans le domaine de la recherche?
On participe au Mastère HADA (Helicopter, Aircraft and Drone Architecture). Les professeurs expliquant les différentes technologies dans le détail, notre rôle étant de présenter les applications sur les drones et les obligations industrielles du marché. Nous leur montrons que les contraintes sont différentes entre, construire cent ou mille drones et un prototype en laboratoire. Notre obligation au quotidien est de vendre des drones et d’avoir des applications immédiates, ce qui n’est pas forcément le cas de la recherche.
Il y a une différence d’échelle de temps. Avec l’ISAE-SUPAERO, nous savons ce que chacun peut amener à l’autre. Nous essayons de trouver le lien entre les personnes qui cherchent à découvrir de nouvelles technologies dans les laboratoires, et celles qui s’en serviront pour réaliser un nouveau drone. Nous partageons l’intérêt pour des sujets sur lesquels nous travaillons ensemble comme le dynamic soaring, ou vol de gradient. Le concept consiste à extraire de l’énergie dans le gradient de vent dans l’atmosphère. Le drone va capter de l’énergie par différence de vitesse de vente et avoir un meilleur rendement avec moins d’énergie embarquée. Cette collaboration avec des laboratoires est indispensable.
La sécurité des vols, et la fiabilité sont les thèmes principaux des rendez-vous aéro de l’innovation auquel vous participez. Comment abordez-vous le sujet dans le développement des nouveaux usages de vos drones?
La fiabilité est pour nous un axe stratégique prioritaire. Le DT 18, notre premier drone commercialisé, est le premier au monde à avoir eu l’autorisation de vol « hors vue ». Il était conforme aux spécifications énoncées par l’autorité de régularisation française, la DGAC. Nous avons toujours voulu devancer les réglementations et avoir ainsi un peu d’avance.
La fiabilisation des drones pour se rapprocher du niveau de sécurité et de certification des avions habités fait débat au niveau de la réglementation aéronautique. Les enjeux sont cependant différents. C’est ici encore une question d’échelle. Une des craintes principales pour un drone, est la collision avec un autre aéronef ou celle d’un crash au sol. Ces incidents sont très graves et doivent être gérés de manière appropriée.
Il faut donc adapter la gestion du risque aux niveaux de risque estimés. Le volume des marchés des Airbus est aussi supérieur à celui des petits drones. Il est nécessaire de trouver un compromis où les risques soient acceptables aussi en fonction des coûts.
Stratégiquement, nous nous positionnons sur une sécurité maximale en utilisant des dispositifs de sécurité supplémentaires en redondance, qui ne sont pas demandés par la réglementation en cours. Ces mesures ont un coût, mais on essaye d’avoir de l’avance dans ce domaine pour contrer la concurrence étrangère à bas coût. Nous progressons vers l’évolution des certifications petit à petit.
La réglementation française a ouvert de manière restreinte les conditions de vol du scénario S4, c’est-à-dire le hors vue. L’idée étant de recueillir des données qui n’existaient pas dans ce domaine et en fonction des résultats ouvrir d’autres domaines de vols en toute sécurité.
Avec nos clients industriels, utilisateurs de nos systèmes, nous ajoutons des fonctions de sécurité supplémentaires pour faire évoluer cette réglementation en fonction des résultats de fiabilité que nous obtenons.
Cette réglementation nous fait progresser au niveau de la surveillance d’infrastructures d’énergie. On est les seuls au monde à avoir une connaissance des besoins des gestionnaires de lignes électriques grâce à nos autorisations et capacités de vol nous permettant d’obtenir et de traiter toutes les images et données voulues par le client.
Est-ce que les technologies que vous employez auront des retombées dans d’autres domaines?
Nous sommes présents sur plusieurs marchés comme celui de l’agriculture où les informations que nous recueillons au plus près des plantations, permet par exemple, d’employer moins de fertilisant, de traiter plus précisément les plantes dans un meilleur respect de l’environnement.
Michelin utilise nos drones pour optimiser leur plantation de caoutchouc en Indonésie et prévoir leur production à 3 ans selon l’état de santé des arbres.
Extraits de l’article publié par ISAE-SUPAERO le 25 juin 2019
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